C'est qui ? C'est Aki (Kaurismaki)Autour de lui : art buccal et Jean Vigo...
- montage47
- 30 juin
- 4 min de lecture
Quelques semaines après ma prise de fonction comme présentateur cinéma de "Nulle part ailleurs" sur Canal Plus, j'ai décidé de n'en faire qu'à ma tête pour le choix des films. Je savais que la chaîne eusse préféré des films très très porteurs, mais je partais du principe que c'est la manière de parler d'un film qui importe, autant que les a apriori sur le film lui-même.
Totalement exalté par "Hamlet goes business" de Kaurismaki, vu dans une peojection de presse à 10h du mat', j'étais le seul visiblement à avoir des frissons (*). Nous étions une petite quinzaine de journalistes dans la salle, j'étais le seul à rire, ce cette politesse du désespoir si typique des nordiques (même à jeun...)

Le jour de ma chronique, Mathilda May était invitée pour parler de "3 Places pour le 26" de Jacques Demy... Face à elle (que je connaissais déjà un peu, nous avions dansé ensemble à l'UBU, célèbre boîte de nuit Toulousaine en début d'année), je fais donc une chronique sur "Hamlet..."/
En prenant le métro du retour, je sens bien que je n'ai pas été très bon. Evidemment, quand vous êtes le seul à avoir vu le film, qu'il est sans acteur connu, sans autre accroche que le talent du cinéaste, dur de briller.... Les jours passent.
3 jours après, Christine Touchard, l'assistante de Philippe Gildas, me donne une enveloppe timbrée, issue du courrier des lecteurs, en l'occurrence une lectrice. A l'époque, je recevais une dizaine de lettres par semaine, notamment de prisonniers ou de gens sensibles à mon charme. (c'est du passé !)

La lettre émanait de l'attachée de presse du film de Kaurismaki, une certaine Chantal Poupaud. Elle n'en était pas revenue que sur Canal Plus -"la chaîne du foot et du porno" comme beaucoup l'appelait, il ne faut pas se leurrer-, un critique ait consacré du temps à un film finlandais en noir et blanc. Elle me remercie donc, et ajoute que malheureusement, son fils de 6 ans, Melvil (**), a oublié d'enregistrer l'émission en VHS, tâche qui lui est attribuée tous les soirs. "Pourriez-vous m'en envoyer une autre ?" me demande Chantal ? Je fais mon maximum et elle me rmercie en m'invitant à un dîner privé la semaine suivante avec Aki, et sondistributeur. Je suis honoré, sur un nuage. Aki étant en retard, je faius la connaissance de Chantal, qui avait été mannequin dans une première vie. Elle racontait à l'assemblée une blague tirée par les cheveux sur le meilleur moyen de faire une fellation (la bouche doit lentement dire "Gina Lollobrigida" et non "Anna Magnani", trop brutale pour le sexe d'un homme dans la bouche d'une femme ! Moi qui débarquait de mon petit village de région, me voilà au sein des seins de la vie parisienne.

Avec 30 minutes de retard, Aki poussa la porte d'entrée du restaurant du quartier latin où nous l'attendions comme le messie Aki... Il vient s'asseoir en bout de table, seule place libre et se retrouve en face de moi. En raison de mon jeune âge, je me devais de ne pas me mettre en avant... Il s'assied et là, pourle mettre à l'aise (et surtout me donner une contenance), je lui sers un verre de vin. Surprise, il décline la proposition. Je repose la bouteille qu'il prend aussitôt et boît cul-sec dans sa bouche ! Et bien, entre fellation et goulot, je perdais mon innocence... Le dîner passe, imbibé, j'essaie de faire bonne figure (synonyme de "Je n'ai l'air de rien...")
Minuit arrive, on appelle des taxis. A l'époque, il y avait encore des ports-manteaux dans les restos et donc un petit moment obligé de transit avant de sortir (perso : je trouve criminel d'avoir enlevé les portes-manteaux dans notre monde actuel, j'adore ce qu'ils représentent en termes de convivialité...)

Aki arrive dans mon dos, me sourit. Il me demande comment je vois mon avenir. Je lui réponds que je vois la critique comme un passage provisoire, qu'il est malsain de faire ça toute sa vie, que l'être humain n'est pas programmé pour être un simple commentateur, sous peine de graves déconvenues. Il est surpris, mais touché. Et, au moment de prendre son manteau, il se tourne vers moi, et, comme une confidence dit : "Vous ferez des films, ils ressembleront à ceux de Jean Vigo !". Nous nous sommes salués. Dans la rue, puis le métro, j'ai commencé à croire aux prophètes, à ceux qui, in vino very veritas, se jettent à l'eau...
I y a deux semaines, j'ai tourné une séquence de mon nouveau film, dans un musée de l'école 1900, où tous les meubles et accessoires sont dans leur jus. A un moment, mon esprit a vagabondé et une idée a traversé mon esprit : tu fais des films comme Vigo ! (pensez à son film "Zéro de conduite !" Bravo Aki !
*La même chose m'est arrivée pour le premier film de Denis Villeneuve ("Un 32 Août sur terre") qui laissait quasi de marbre la presse, quand elle daignait en parler?. Moi, je de dédaigne pas daigner...
** Et oui, Melvil Poupaud...

Comments